12 MAI (ASPAMNEWS)- L’Algérie multiplie les expulsions vers le Niger de migrants subsahariens dans des convois plus ou moins officiels, et sans aucune humanité. Plus de 11.300 personnes ont été expulsées vers le Niger depuis le début de l’année. Largués à la frontière, ils doivent traverser le désert.
L’Algérie est devenue une machine à expulser. Terre d’immigration pour de nombreux Subsahariens, ce pays a longtemps fermé les yeux sur un phénomène dont tout le monde semblait s’accommoder : ces migrants venaient faire les travaux dont ne voulaient plus les jeunes Algériens.
Assamaka, village proche de la frontière entre l’Algérie et le Niger, est le réceptacle des migrants d’origine subsaharienne expulsés par l’Algérie. Abandonnés dans le désert, les migrants pour survivre, doivent marcher plusieurs heures pour atteindre le village d’Assamaka.
Un convoi arrive au « Point zéro » en ce mois de mai 2023, un no man’s land situé à la frontière algéro-nigérienne où les autorités algériennes jettent les migrants, en plein désert. Sur les 899 personnes arrivées ce jour-là, Alarme Phone Sahara, une ONG humanitaire, a recensé une majorité de Guinéens et de Maliens et une seule personne de nationalité nigérienne.
Parmi eux, un grand nombre d’hommes, mais aussi des femmes parfois enceintes, des enfants et des personnes âgées. Certains ont été dépouillés de leurs biens lors de leur arrestation. Isolés au milieu du désert, parfois en pleine nuit, toutes et tous se retrouvent sans eau ni nourriture, et doivent parcourir 15 kilomètres à pied pour rejoindre le village d’Assamaka. Un chemin où l’on peut se perdre. En les abandonnant ainsi, le gouvernement algérien les met en danger de mort.
Aprèsla travrsée du désert, certains migrants arrivent en ville ou font tout pour regagner leur pays d’origine. C’est l cas de Felicity qui a pu regagner son pays le Nigeria. « Il n’y a rien de mieux qu’une maison. Maintenant, nous sommes de retour et en sécurité. Personne ne peut plus nous mépriser, nous sommes heureux » assure la jeune Nigériane de 20 ans qui se réjouit d’être rentrée.
Felicity a fait le dangereux voyage à travers le désert en septembre 2020. Son objectif : atteindre l’Europe. Mais comme des milliers d’autres personnes, elle s’est retrouvée en Lybie en passant par l’Algérie, l’un des pays qui sert de point de départ à la coûteuse traversée vers l’Europe.
Mais souvent de nombreux migrants y sont brutalisés et doivent lutter pour leur survie. Au cours des trois dernières années, plus de 13.000 Nigérians sont retournés volontairement dans leur pays d’origine avec l’aide d’agences gouvernementales nigérianes et de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), selon les Nations unies.
Le migrants arrivés à Assamaka, n’ont parfois d’autre choix que d’y rester sans aucune solution et d’errer dans les rues de cette petite localité perdue au milieu du désert. Entre le 1er janvier et le 1er avril 2023, l’ONG Alarme Phone Sahara, a comptabilisé plus de 11 336 personnes ont été expulsées de l’Algérie vers le Niger. Début mai, plus de 5 000 d’entre elles étaient bloquées à Assamaka, selon les autorités nigériennes.
Isolés au milieu du désert, parfois en pleine nuit, toutes et tous se retrouvent sans eau ni nourriture, et doivent parcourir 15 kilomètres à pied pour rejoindre le village d’Assamaka. Un chemin où l’on peut se perdre. En les abandonnant ainsi, le gouvernement algérien les met en danger de mort.
Les organisations d’aide aux migrants sont désemparées. L’OIM semble paralysée. Moctar Dan Yaye de l’ONG humanitaire, Alarme Phone Sahara, rapporte qu’elle a dû fermer ses portes aux nouveaux arrivants le temps de traiter les dossiers des migrants déjà sur place. Or c’est par cette organisation onusienne que doivent passer les rapatriés d’Algérie lorsqu’ils rejoignent Assamaka.
« Les migrants bloqués à Assamaka n’ont pas d’autre choix que de mendier toute la journée pour survivre, et de dormir dans les rues du village. Les personnes expulsées volent et abattent même des animaux pour se nourrir. Cela crée des tensions et des conflits supplémentaires », avait déclaré Moctar Dan Yaye.
Selon l’OIM, environ 21 millions d’Africains vivaient dans un autre pays africain en 2020.
En Afrique de l’Ouest, un nombre particulièrement important de personnes vont dans les pays voisins. A en croire l’OIM, plus de 70 % des mouvements migratoires en Afrique sont internes. La migration irrégulière de l’Afrique subsaharienne vers l’Europe, mais aussi entre l’Afrique de l’Ouest et l’Afrique centrale, a toutefois considérablement augmenté ces dernières années.
Mais à mesure que la migration augmente, le nombre de retours forcés est également en hausse. L’Algérie procède ainsi à des expulsions depuis des années. « Après tout le traumatisme qu’ils ont subi, c’est à dire le racket et le refoulement, maintenant ils doivent encore marcher pour atteindre un village où ils peuvent avoir une première assistance, ou bien voir des visages humains », a expliqué Moctar Dan Yaye.
Rappelons que depuis 2014, l’Algérie multiplie les expulsions vers le Niger de migrants subsahariens dans des convois plus ou moins officiels, et sans aucune humanité. (SPM/2023)