instants pénibles d’identification de 38 corps sans vie dans une pirogue au large de Dakar

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DAKAR, 24 SEPTEMBRE (ASPAMNEWS)-L’entame de l’exercice est des plus éprouvantes. Les agents à bord de la pirogue sont amenés à assembler plusieurs dizaines de corps entassés dans l’embarcation. Les tâches les plus simples ont consisté au remontage des corps retrouvés entiers. La complexité de l’exercice a été pour les agents de réussir l’assemblage de plusieurs corps démembrés. Ce n’est pas tout, puisque l’état de putréfaction extrêmement avancé est tel qu’il est arrivé qu’un membre se désintègre au touché, au moment de l’assemblage d’une dépouille.

Sur les 38 corps, 2 ont été identifiés comme étant ceux de dames. La haute hiérarchie de la police a confié l’enquête aux limiers du commissariat spécial du Port, leurs collègues de la Division nationale de lutte contre le trafic de migrants (DNLT), qui vont travailler en synergie avec la police scientifique.

Tout ce beau monde a embarqué à bord du patrouilleur de la Marine nationale «Le Cayor». Direction les lieux de la terrible découverte, à des dizaines de kilomètres de Dakar. Les autorités ayant décidé, souligne L’Obs, de ne pas convoyer sur la terre ferme «la pirogue de l’horreur», de la «traiter» en mer.

L’opération a débuté dans la matinée et s’est poursuivie jusqu’aux environs de 23 heures. «Il y a eu un premier décompte de 34 corps suivis de quatre autres dépouilles, portant à 38 les corps sans vie remontés [à bord du patrouilleur de la Marine], rapportent des cadres de la police qui se sont confiés au journal. […] Les agents à bord de la pirogue sont amenés à assembler plusieurs dizaines de corps entassés dans l’embarcation. Les tâches les plus simples ont consisté au remontage des corps retrouvés entiers.»

D’autres sources de poursuivre : «La complexité de l’exercice a été pour les agents de réussir à soulever les corps dont certains sont déjà démembrés. Pire, des témoins racontent que la plupart des dépouilles étaient déjà désintégrées. Ce qui a rendu extrêmement complexe le déplacement des corps mis dans des sacs et disposés à bord du patrouilleur.»

une autre renseigne que si l’identification des victimes s’avère quasi impossible, à cause de l’état de décomposition avancée des dépouilles, deux des corps sans vie sont déjà reconnus comme ceux de femmes.

D’où est partie la pirogue ? Combien de passagers étaient-ils à bord ? Pour quelle destination ? Dans quelles conditions les victimes sont-elles mortes ? Y aurait-il des rescapés ? Cette embarcation serait-elle celle qui a quitté Mbour le 13 août dernier avec 150 migrants et dont on n’a aucune nouvelle depuis ?

Rappelons que ce sont des pêcheurs qui ont découvert, le 22 septembre dernier, une pirogue avec des corps en décomposition, au large de Dakar, la capitale du Sénégal. La triste et horrifiante information a été servie par la Marine nationale, qui a dépêché une équipe sur les lieux, ce lundi 23 septembre.

Cette sinistre découverte faite à environ 48 km de la côte dakaroise, intervient alors que tout le Sénégal, voire l’Afrique entière, continuent de faire couler un torrent de larmes sur au moins 39 cadavres, bilan macabre, et sans doute encore incomplet, du naufrage, le dimanche 8 septembre, d’une pirogue dans laquelle se sont entassés une centaine de candidats à l’immigration clandestine, ayant quitté la ville portuaire de Mbour et en route pour les Iles Canaries.

Dans la foulée, deux embarcations du même type que celle qui a coulé après avoir levé l’ancre de Mbour, avec à leur bord, plus de 400 personnes, dont plus de 20 enfants et des femmes, ont été interceptées par la marine sénégalaise. Ce qui a, peut-être, évité, à leurs passagers, un sort semblable aux morts du 8 septembre.

La citadelle Europe, eldorado rêvé de ces malheureux hommes, femmes et enfants, croyant naviguer vers un quotidien meilleur, devient de plus en plus imprenable. Même la Méditerranée s’y met, elle qui engloutit, comme un monstre insatiable, des milliers de téméraires qui tentent de braver bien des dangers, empruntant des moyens de transport d’une précarité alarmante.

Mais, pour eux, l’essentiel est de partir! Et tout est mis en œuvre pour atteindre ce but que se fixe, non pas un individu, mais toute une famille, qui met en commun toutes les économies de ses membres, pour offrir le voyage au fils prodigue, qui a pour mission de sauver les siens de la misère. 

Pourtant, cette rondelette somme remise aux passeurs véreux qui savent toujours se tirer d’affaire, abandonnant en haute mer ou en plein désert, leurs passagers aux mains de gardes-côtes sans pitié, ou d’esclavagistes des temps modernes, peut servir à s’ouvrir des opportunités sur place.

Parfois, c’est dame nature qui se mêle de la partie, faisant chavirer ces frêles embarcations, dans la furie des vagues et autres tempêtes. C’est pourquoi, chaque tous les Sénégalais doivent épouser la lutte du collectif «Dafa Doy», soit «ça suffit» en wolof, qui a opté d’interpeller les dirigeants sénégalais, pour la prise, par eux, de mesures urgentes et concrètes, afin d’offrir des alternatives pertinentes et surtout de l’espoir à une jeunesse désespérée.

«C’est un cri du coeur pour dire que nous ne voulons plus que nos frères et sœurs disparaissent en mer», a scandé «Dafa Doy» dans sa marche silencieuse du samedi 21 septembre. Tout un programme pour la prochaine assemblée nationale qui sortira des élections législatives anticipées du 17 novembre.

De même, et fort à propos, le Collectif est conscient que le véritable travail à mener pour contrer le mal, est la sensibilisation auprès de ces nombreux candidats à l’immigration, sur les mille et un dangers qui les guettent, en mer, dans le désert et même dans les pays où ils espèrent une vie meilleure, alors que les temps ont bien changé.

En tout cas, plus que de simples interpellations qui risquent de demeurer voeux pieux, il urge de briser ce mythe du mieux-être qui ne se trouve qu’ailleurs, illusion partagée depuis la nuit des temps, et ancrée dans la culture des peuples de pays d’immigration comme le Sénégal et le Mali, pour ne citer que ceux-ci. Car, pour les migrants clandestins, le voyage vers le bonheur s’est presque toujours transformé en traversée vers l’horreur. Et au bout du parcours, se trouve le couple infernal de l’incertitude et de la mort! (SHG/2024)

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