ATHÈNES, 15 JUIN (ASPAMNEWS)-Des dizaines de corps de migrants ont été repêchées mercredi 14 juin au large du Péloponnèse, en Grèce, après le naufrage d’un navire qui comptait quelque 400 passagers, partis de Tobrouk, en Libye. Les recherches se poursuivent pour retrouver des survivants. La Grèce a déclaré trois jours de deuil après la tragédie.
Une embarcation transportant des « centaines » de migrants a fait naufrage mercredi 14 juin au sud-ouest de la Grèce, ont indiqué les gardes-côtes grecs. Le bateau de pêche a chaviré dans les eaux internationales au large de la péninsule du Péloponnèse, ont annoncé les gardes-côtes.
Selon le groupe audiovisuel grec ERT, le navire aurait appareillé du port de Tobrouk, situé dans l’est de la Libye et au sud de la Crète, à destination de l’Italie. On ne sait pas précisément combien de passagers étaient sur le bateau, les autorités grecques ayant affirmé que des personnes embarquées sur le bateau de pêche leur avaient assuré avoir été au moins 750 à son bord, dont une centaine d’enfants.
Au moins 78 personnes se sont noyées. Des centaines de personnes sont portées disparues. Les gardes-côtes ont précisé qu’au moment du drame aucun passager n’était équipé d’un gilet de sauvetage.
Une vaste opération de sauvetage entamée mercredi matin a permis de secourir 104 personnes au total, ont-ils ajouté, malgré de mauvaises conditions de mer et un vent violent. Ces rescapés sont en majorité des Syriens (47) et des Égyptiens (43). Il y avait également douze Pakistanais et deux Palestiniens, selon les autorités grecques. Les naufragés sains et saufs « sont tous des hommes », a déclaré la porte-parole des gardes-côtes.
Avec ses grandes tentes rouges et blanches, le port de Kalamata, dans la péninsule grecque du Péloponnèse, s’est transformé en quelques minutes en refuge de fortune pour les 104 migrants sauvés de la noyade aux premières heures de la journée, mercredi 14 juin.
Une centaine de jeunes hommes pour l’essentiel, pieds nus et regard perdu, ont été pris en charge par les secours, après le naufrage de leur navire de fortune en mer Ionienne, le pire depuis juin 2016 au large de la Grèce. Quatre d’entre eux ont dû être hospitalisés en hypothermie.
Les survivants sont temporairement hébergés dans un entrepôt du port de Kalamata afin d’être identifiés par les autorités, qui recherchent parmi eux d’éventuels passeurs.
La Grèce a connu de nombreux naufrages d’embarcations de migrants, souvent vétustes et surchargées, mais il s’agit jusqu’ici du bilan humain le plus lourd depuis sept ans. « Il pourrait s’agir de la pire tragédie maritime de ces dernières années en Grèce », a affirmé Stella Nanou, du Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR).
Quelles sont les causes de cette tragédie ?
D’après le porte-parole du gouvernement, Ilias Siakantari, le moteur du bateau a lâché peu avant 23 heures mardi soir et le navire a chaviré à 47 milles nautiques (environ 87 km) de Pylos, en mer Ionienne, coulant en dix à quinze minutes.
Une image de piètre qualité diffusée par les gardes-côtes montrait un chalutier bleu et manifestement décrépi surchargé de personnes, amassées du pont à la proue et à la poupe, et même sur le toit de la cabine.
Selon les autorités portuaires grecques, un avion de surveillance de l’agence européenne Frontex avait repéré le bateau mardi après-midi. Mais selon elles, les passagers ont « refusé toute aide ».
La Libye, un carrefour migratoire
D’après les premiers éléments, l’embarcation a chaviré à 47 milles marins (près de 90 kilomètres) des côtes grecques dans les eaux internationales où de plus en plus de passeurs naviguent pour éviter les patrouilles locales de garde-côtes. Le bateau, qui se dirigeait vers les rives italiennes, avait néanmoins été repéré dès mardi par Frontex, lui-même alerté par les gardes-côtes italiennes et les autorités grecques. Mais à en croire les garde-côtes grecs, ses passagers auraient « refusé l’aide et indiqué leur souhait de poursuivre leur voyage ». Quelques heures plus tard, le navire chavirait et sombrait. La Grèce a déclaré trois jours de deuil.
Les migrants qui se trouvaient à bord étaient pour la plupart originaires d’Égypte, de Syrie et du Pakistan, affirment les autorités grecques. Mais selon le groupe audiovisuel grec ERT, le navire serait parti du port de Tobrouk, dans l’est de la Libye et au sud de la Crète.
Devenue ces dernières années un carrefour migratoire, la Libye compte, d’après l’OIM, plus de 600 000 candidats à l’exil désireux de gagner l’Europe par la Méditerranée. Des migrants arrivés clandestinement d’Afrique subsaharienne pour un grand nombre, via les frontières perméables du vaste Sud désertique.
1 257 morts en Méditerranée depuis le début de l’année
Les garde-côtes libyens sont régulièrement accusés par les ONG d’intercepter des bateaux de migrants, y compris avec l’aide de moyens européens comme la surveillance aérienne de Frontex, et de les renvoyer de force en Libye. Or, depuis le début du mois, les autorités libyennes ont lancé une vaste répression contre ces migrants, en particulier dans la partie orientale du pays, avec des milliers d’arrestations.
La mission d’appui des Nations unies (Manul) dans le pays s’est d’ailleurs émue le 12 juin du mauvais traitement infligé à ces migrants, victimes de « détentions arbitraires massives ». La Manul dénonce en particulier la détention de « femmes enceintes et d’enfants » dans des lieux « surpeuplés et insalubres », et « l’expulsion collective » de milliers d’étrangers, même entrés légalement sur le sol libyen. Depuis le début de l’année, quelque 70 000 réfugiés et migrants sont arrivés par voie maritime en Europe, selon les données de l’ONU. Et au 12 juin, 1 257 personnes y avaient laissé leur vie.
Rappelons que les recherches se poursuivaient ce jeudi matin. Deux patrouilleurs, un hélicoptère et six autres navires de la région continuaient à inspecter les eaux à l’ouest des côtes du Péloponnèse, l’une des zones les plus profondes de la Méditerranée, a indiqué une porte-parole des autorités portuaires. (LCJ/2023)